Les Montagnes Les montagnes, les bois, les divinités champêtresLes Montagnes étaient filles de la Terre. On les regardait presque partout comme des lieux sacrés, souvent même on les adorait comme des divinités. Les anciennes médailles les figurent comme des génies dont chacun est caractérisé par quelque production du pays.
En Grèce, la chaîne du Pinde était tout entière consacrée à Mars et à Apollon, mais les poètes s'étudièrent à entourer de fables ou de légendes particulières les principaux sommets de cette montagne.
Ainsi, comme le mont Œta, en Thessalie, s'étend jusqu'à la mer Égée située à l'extrémité orientale de l'Europe, on prétendait que le soleil et les étoiles se levaient à côté de cette montagne, et que de là naissaient le jour et la nuit. Hesperus (Vesper) y était honoré. Le mont Œta rappelle la mort et le bûcher d'Hercule.
Le Parnasse, la plus haute montagne de la Phocide, a deux sommets fameux : l'un était consacré à Apollon et aux Muses, et l'autre à Bacchus. C'est entre ces deux sommets que sort la fontaine de Castalie. Ce fut sur cette montagne que Deucalion et Pyrrha se retirèrent du temps du déluge. Les anciens la croyaient placée au milieu de la terre : elle était du moins au milieu de la Grèce.
Le Cithéron, en Béotie, était consacré aux Muses et à Jupiter, mais c'était sur la montagne voisine, l'Hélicon, que les Muses recevaient le plus d'honneurs. Cette montagne, disait-on, leur avait été consacrée, dès l'époque la plus reculée et presque dès l'origine du monde, par les deux géants Aloïdes, Otus et Éphialte. On y voyait un temple dédié à ces déesses, la fontaine d'Hippocrène, la grotte des nymphes Libéthrides, souvent confondues ou identifiées avec les Muses elles-mêmes, le tombeau d'Orphée et les statues des principaux dieux, œuvres des artistes les plus habiles de la Grèce. On y remarquait aussi un bois sacré où, chaque année, les habitants de Thespies célébraient la double fête en l'honneur des Muses et de Cupidon.
L'Hymette, en Attique, est célèbre par l'excellence et l'abondance de son miel, et par le culte qu'on y rendait à Jupiter.
Le Cyllène, le Lycée et le Ménale en Arcadie, ainsi que le Taygète en Laconie, sont, à divers titres, célébrés par les poètes. Les deux premières de ces montagnes étaient consacrées à Jupiter et au dieu Pan, le Ménale à Apollon et le Taygète à Bacchus. Mais c'était aussi dans le cirque formé par les montagnes d'Arcadie que Diane aimait à se livrer au plaisir de la chasse, et son culte n'y était pas négligé. La fable raconte que c'est sur le mont Ménale que le héros Hercule poursuivit la biche aux pieds d'airain et aux cornes d'or ; par respect pour Diane à qui elle était consacrée, il s'abstint de la percer de ses flèches et la captura vivante au moment où elle allait traverser le Ladon.
En dehors de la Grèce, le mont Rhodope ou Hémus en Thrace est célèbre dans la Mythologie par le séjour d'Orphée. Hémus, fils de Borée et d'Orithyie d'Athènes et mari de Rhodope, était un roi de Thrace. Ce roi et cette reine, aspirant aux honneurs divins, voulurent se faire adorer sous les noms de Jupiter et de Junon. Cette folle prétention fut cause que les dieux indignés les changèrent l'un et l'autre en une seule montagne. C'est sur le sommet du Rhodope que les poètes placent le dieu Mars, lorsqu'il examine en quel endroit de la terre il exercent ses fureurs.
Le mont Niphate, entre le Pont-Euxin et la mer d'Hyrcanie, ou mer Caspienne, s'est appelé Caucase, du nom d'un berger tué par Saturne, à l'époque où, pour se dérober aux poursuites de Jupiter, il s'était réfugié sur cette montagne, après la guerre des Géants. C'est pour honorer et perpétuer la mémoire de ce berger que Jupiter voulut que la montagne prît son nom. Ce fut sur le Caucase que Prométhée fut enchainé et déchiré par un aigle.
À l'autre extrémité du monde connu des anciens, s'élevait, vers l'ouest, le mont Atlas dont les sommets couverts de neige se perdent dans les nues, tandis que ses pieds se prolongent et pénètrent profondément dans l'Océan qui porte son nom.
Atlas, fils du Titan Japet et de l'Océanide Clymène, petit-fils d'Uranus et neveu de Saturne, prêta son concours aux Géants dans leur guerre contre Jupiter. En punition de cette complicité, le maure de l'Olympe, resté vainqueur, le changea en montagne, et le condamna à soutenir sur ses épaules la voûte du ciel.
D'après une autre fable, Atlas, propriétaire du jardin des Hespérides, averti par un oracle de se défier d'un fils de Jupiter, refusa l'hospitalité à Persée qui lui présenta la tête de Méduse et le changea en montagne.
On le représente comme un géant debout au milieu des eaux, supportant la sphère céleste, et gémissant sous un tel fardeau. Hercule un jour prit sa place, et lui permit de se reposer, mais depuis longtemps Hercule a quitté ce monde, et Atlas, le dos voûté, continue à endurer des fatigues séculaires sous le poids du ciel.
Au-dessus de sa tête il aperçoit parfois les Atlantides ses filles qui, sous le nom de Pléiades, se groupent et brillent, parmi les étoiles. À ses pieds, du côté de la Mauritanie, il apercevait aussi les Hespérides, Eglé, Aréthuse et Hypéréthuse, trois filles que lui donna Hespéris ou la Nuit, son épouse, issue d'Hespérus (Vesper). Ces trois sœurs avaient dans leur jardin les pommiers aux fruits d'or, arbres fameux placés sous la garde d'un dragon aux cent têtes. Ces pommes d'or, sur lesquelles le terrible dragon tenait les yeux sans cesse ouverts, avaient une vertu surprenante. Ce fut avec une d'elles que la Discorde brouilla les trois déesses, Junon,Vénus et Minerve ; ce fut avec le même fruit qu'Hippomène vainquit à la course l'invincible Atalante et obtint sa main en récompense de la victoire. Afin de retarder Atalante dans sa course, l'adroit Hippomène lui jetait à quelque distance l'une de l'autre des pommes d'or qu'elle s'attardait à ramasser.
Les Hespérides avaient la voix charmante et le don de se dérober aux yeux par des métamorphoses soudaines. Hercule au cours de ses travaux cueillit les pommes d'or, et tua le dragon de leur merveilleux jardin.
La Mythologie, qui a consacré et déifié les montagnes, devait aussi réserver un culte aux volcans, et en particulier à l'Etna. Non seulement cette célèbre montagne de Sicile passait pour renfermer les forges de Vulcain et l'atelier des Cyclopes ; mais, persuadés qu'elle était en communication avec les divinités infernales, les peuples anciens se servaient de ses éruptions pour présager l'avenir. On jetait dans le cratère des objets d'or ou d'argent et même des victimes. Si le feu les dévorait, le présage était heureux, et, au contraire, il était funeste, si la lave venait à les rejeter.