Nous avons cru devoir expliquer ci-dessus ce que, dans un sens très général, les Grecs entendaient par les mots
Éros, Antéros. Ces deux expressions prirent avec le temps une signification beaucoup plus restreinte dans la langue commune aussi bien que dans la langue poétique.
Éros finit donc par désigner « l'amour », avec l'acception du terme latin équivalent,
amor. Son composé
Antéros eut dès lors non plus seulement le sens de
contre-amour, mais encore et plus souvent celui
d'amour pour amour.
Vénus, disent les poètes, se plaignant à Thémis de ce qu'Éros, son fils, restait toujours enfant, la déesse consultée répondit qu'il ne grandirait point tant qu'elle n'en aurait pas d'autre. Alors sa mère lui donna pour frère Antéros avec lequel il commença à grandir. Par cette jolie fiction, les poètes ont voulu faire entendre que l'amour, pour croître, a besoin de retour. On représentait Antéros, comme son frère, sous la figure d'un petit enfant, avec des ailes, un carquois, des flèches et un baudrier.
Le nom de
Cupidon, en latin, implique l'idée d'amour violent, de désir amoureux, en grec
Iméros. Mais, dans la mythologie latine, on prête à ce dieu à peu près la même origine, la même histoire qu'au dieu grec
Éros, amour.
Cupidon, d'après le plus grand nombre des poètes, naquit de Mars et de Vénus. Dès qu'il eut vu le jour, Jupiter, qui connut à sa physionomie tous les troubles qu'il causerait, voulut obliger Vénus à s'en défaire. Pour le dérober à la colère de Jupiter, elle le cacha dans les bois, où il suça le lait des bêtes féroces. Aussitôt qu'il put manier l'arc, il s'en fit un de frêne, employa le cyprès à faire des flèches, et essaya sur les animaux les coups qu'il destinait aux hommes. Depuis il échangea son arc et son carquois contre d'autres en or.
Il est ordinairement représenté sous la figure d'un enfant de sept à huit ans, l'air désœuvré, mais malin : armé d’un arc et d'un carquois rempli de flèches ardentes, quelquefois d'une torche allumée ou d'un casque et d'une lance ; couronné. de roses, emblème des plaisirs. Tantôt, il est aveugle, car l'Amour n'aperçoit pas de défauts dans l'objet aimé ; tantôt il tient une rose d'une main et un dauphin de l'autre. Quelquefois on le voit entre Hercule et Mercure, symbole de ce que peuvent en amour la valeur et l'éloquence. Parfois il est placé près de la Fortune ayant comme lui un bandeau sur les yeux. Il est toujours peint avec des ailes, et ces ailes sont de couleur d'azur, de pourpre et d'or. Il se montre dans l'air, le feu, sur la terre et la mer. Il conduit des chars, touche la lyre, ou monte des lions, des panthères et quelquefois un dauphin, pour indiquer qu'il n'y a point de créature qui échappe au pouvoir de l'Amour.
Il n'est pas rare de le voir représenté auprès de sa mère qui joue avec lui, le taquine ou le pressa tendrement contre son cœur.
Parmi les oiseaux, il aime le coq et le cygne, oiseau favori de Vénus ; lui-même prend parfois des ailes de vautour, symbole de la cruauté. Il se plaît à monter sur le cygne dont il embrasse le cou ; et, quand il se tient sur le dos du bélier, on voit paraître sur son visage autant d'allégresse et de fierté que lorsqu'il est assis sur un lion, sur un centaure ou sur les épaules d'Hercule.
S'il porte le casque, la pique et le bouclier, il affecte de prendre une attitude, une démarche guerrières, montrant ainsi qu'il est partout victorieux, et que Mars lui-même se laisse désarmer par l'Amour.
Cupidon s'éprit d'une violente passion pour une simple mortelle, Psyché, princesse d'une beauté ravissante ; et il voulut devenir son époux. Longtemps Vénus fit opposition à ce mariage, et soumit Psyché à de difficiles et presque insurmontables épreuves. Enfin Cupidon alla se plaindre à Jupiter qui se déclara pour lui. Mercure reçut l'ordre d'enlever au ciel Psyché qui, étant admise en la compagnie des dieux, but le nectar, l'ambroisie, et devint immortelle. On prépara le festin des noces. Chaque dieu y joua son personnage ; Vénus même y dansa. Plus tard Psyché mit au monde une fille qu'on appela Volupté. La fable de Psyché (mot grec qui signifie âme) a inspiré Apulée, La Fontaine, le poète V. de Laprade, le grand peintre baron Gérard, etc.
Les invocations à Cupidon ou à l'Amour sont nombreuses dans les poètes. Son culte était le plus souvent associé à celui de sa mère, Vénus ou Aphrodite.