Le « document humain ». Nous avions cru pouvoir attribuer à M. Zola la paternité de cette expression. De nouvelles recherches nous ont permis de la restituer aujourd'hui à son véritable auteur : M. Edmond de Goncourt.
Au mois d'août 1876, plusieurs années par conséquent avant le Roman expérimental de M. Emile Zola (1880), il écrivait, dans la préface d'une étude intitulée : Quelques créatures de ce temps :
« Ce volume complète l'Œuvre d'imagination des deux frères. Il montre, lors de notre début littéraire, la tendance de nos esprits à déjà introduire dans l'invention la réalité du document humain, à faire entrer dans le roman un peu de cette histoire individuelle qui, dans l'Histoire, n'a pas d'historien. »
Dans la préface des Frères Zemganno, datée du 23 mars 1879, M. de Goncourt disait encore (p. x) :
« Donc ces hommes, ces femmes et même les milieux dans lesquels ils vivent, ne peuvent se rendre qu'au moyen d'immenses emmagasinements d'observations, d'innombrables notes prises à coups de lorgnon, de l'amassement d'une collection de documents humains... Car seuls, disons-le bien haut, les documents humains font les bons livres... »
Enfin, dans une autre préface, celle de son roman la Faustin (1882), il annonçait « un roman bâti sur des documents humains » et ajoutait en note (p. II) :
« Cette expression, très blaguée dans le moment, j'en revendique la paternité, la regardant, cette expression, comme la formule définissant le mieux et le plus significativement le mode nouveau de travail de l'école qui a succédé au romantisme : l'école du document humain. »