Car il n'est si beau jour qui n'amène sa nuit. Chateaubriand, dans ses Mémoires d'outre-tombe, raconte, à la date du 20 septembre 1833, sa visite à l'église Saint-Antoine de Padoue (il Santo), à Padoue.
Dans le cloître, il lut, sur la tombe du jeune d'Orbesan, mort en 1595, une épitaphe qui se termine, dit-il, « par un vers qu'un grand poète voudrait avoir fait » :
Car il n'est si beau jour qui n'amène sa nuit.
Cette belle pensée est empruntée à un dicton dont le Livre des proverbes de Le Roux de Lincy donne ces deux variantes (série III) :
« Il n'est si grand jour qui ne vienne au vespre, ny temps qui ne prenne fin. »
(Adages français, XVIe siècle.)
« II n'y a si long jour qui ne vienne à la nuit. »
(Trésor de G. Meurier, XVIe siècle.)
Il ne voit que la nuit, n'entend que le silence.
On peut encore rapprocher du vers de Delille ce passage célèbre du Paradis perdu, de Milton (1608-1674), que ce grand poète publia en 1667 :
............. Yet from those flames
No light ; but rather darkness visible
Serv'd only to discover sights of woe.
(Pourtant de ces flammes ne sortait pas de lumière, mais plutôt des ténèbres visibles ne servaient qu'à faire entrevoir des spectacles d'horreur. »
(Livre I, v. 62-64.)
Nous rappellerons enfin l'expression employée par Corneille dans ces vers du Cid (acte IV, se. III, v. 1273) :
Cette obscure clarté qui tombe des étoiles
Enfin avec le flux nous fit voir trente voiles.