Il n'y a que le premier pas qui coûte. A ce proverbe, dont l'origine ne nous est d'ailleurs pas connue, se rattache le souvenir d'une heureuse repartie de madame Du Deffand (1697-1780). Elle-même, dans une lettre à Horace Walpole du 6 juin 1767, a ainsi raconté dans quelles circonstances elle a fait l'application de cet aphorisme :
« Vous me demandez mon mot de saint Denis, cela est bien plat à raconter, mais vous le voulez.
» M. le cardinal de Polignac, beau diseur, grand conteur, et d'une excessive crédulité, parlait de saint Denis, et disait que, quand il eut la tête coupée, il la prit et la porta entre ses mains. Tout le monde sait cela ; mais tout le monde ne sait pas qu'ayant été martyrisé sur la montagne de Montmartre, il porta sa tête de Montmartre à Saint-Denis, ce qui fait deux grandes lieues... « Ah ! lui dis-je, monseigneur, je crois que dans une telle situation, il n'y a que le premier pas qui coûte. »
(Correspondance complète de Mme la marquise Du Deffand; lettre 231. — 1865, t. I, p. 433.)
L'anecdote remontait au moins à 1742, année de la mort du cardinal.
Le mot de Mme Du Deffand a été cité par Voltaire, en 1762, dans une note de la Pucelle d'Orléans (chant I, v. 205), et par Grimm, dans sa Correspondance littéraire, à la date du 15 mai 1764.