La plus noble conquête de l'homme. Il est sans doute superflu de rappeler que cette expression fut employée par Billion dans son étude Du cheval, auquel il donne le premier rang parmi les animaux domestiques (Quadrupèdes, 1753).
On connaît le début de ce morceau célèbre :
« La plus noble conquête que l'homme ait jamais faite est celle de ce fier et fougueux animal, qui partage avec lui les fatigues de la guerre et la gloire des combats : aussi intrépide que son maître, le cheval voit le péril et l'affronte ; il se fait au bruit des armes, il l'aime, il le cherche, il s'anime de la même ardeur... »
Il semble que le grand naturaliste se soit inspiré ici d'un fameux passage du livre de Job, où le noble caractère du cheval est ainsi tracé :
« Il frappe du pied la terre, il s'élance avec audace, il court au-devant des hommes armés.
» Il ne peut être touché de la peur, le tranchant des épées ne l'arrête point.
« Les flèches sifflent autour de lui, le fer des lances et des dards le frappe de ses éclairs.
» Il écume, il frémit, et semble vouloir manger la terre ; il est intrépide au bruit des trompettes.
» Lorsque l'on sonne la charge, il dit : Allons ; il sent de loin l'approche des troupes, il entend la voix des capitaines qui encouragent les soldats, et les cris confus d'une armée. »
(Chap. XXXIX, v. 19 à 25.)
Dans une de ses charmantes Nouvelles genevoises, intitulée la Bibliothèque de mon oncle, Rodolphe Tœpffer nous a donné une variante assez originale du mot de Buffon. Il raconte qu'étant écolier, il reçut dans sa salle d'études la visite d'un hanneton qui, de sa tarière trompée dans l'encre, traça sur son cahier quelques hiéroglyphes d'une délicatesse merveilleuse. Bientôt, en guidant patiemment l'insecte, l'enfant parvint A lui faire écrire son nom. « Il fallut deux heures, dit Tœpffer ; mais quel chef-d'œuvre ! » et il ajoute : « La plus noble conquête que l'homme ait faite, dit Buffon, c'est... c'est bien certainement un hanneton ! »